Le marché du e-learning regroupe les activités de formations délivrées par des solutions ou moyens électroniques et par internet. En France, il représentait en 2020 un chiffre d’affaires de 200 millions d’euros, soit 2% du marché mondial de la formation en ligne. Même si la France avait historiquement du retard par rapport à ses voisins européens, elle a su le rattraper en affichant aujourd’hui une croissance parmi les plus fortes en Europe : 15% par an en moyenne ces dernières années.
Quels sont les accélérateurs du développement du e-learning ? Quelles sont les technologies innovantes employées ? En quoi le e-learning est-il attractif pour les entreprises et les organismes ou centres de formation ? Quels sont les différents acteurs de l’EdTech et les leaders du secteur ? Quels sont les facteurs clés de réussite du déploiement de la formation en ligne ?
Les évolutions réglementaires, la récente crise sanitaire et la pénétration des technologies accélèrent la croissance du marché
L’accroissement du taux de pénétration du téléphone portable, de l’ordinateur et d’internet stimule la croissance du marché du digital learning. La part des ménages français possédant un ordinateur a quasiment doublé en quinze ans, atteignant 83% en 2019. La connexion internet a atteint 86% de taux de pénétration en 2019. Quant aux téléphones portables, 96% des foyers en sont équipés contre 69% en 2004.
Les évolutions réglementaires ont également grandement contribué à la croissance du marché en France. Le premier déclencheur a été la loi du 5 mars 2014, qui reconnait la Formation Ouverte et À Distance (FOAD) comme une modalité pédagogique alors qu’elle n’était pas mentionnée dans le code du travail. L’action de formation professionnelle continue peut désormais être réalisée à distance. La loi « Avenir professionnel » du 1er janvier 2019 a, entre autres, monétisé le Compte Personnel de Formation (CPF) qui se cumulait auparavant en nombre d’heures. Celui-ci devient une vitrine pour les formations en ligne, qui sont alors davantage visibles auprès du grand public.
Au-delà des évolutions réglementaires, la crise COVID en 2019 a propulsé le digital learning sur le devant de la scène. L’interdiction temporaire de dispenser les cours en présentiel pour les organismes ou centres de formation et les écoles, et la mise en place du télétravail au sein des entreprises ont marqué un tournant majeur pour le secteur. L’ensemble des acteurs ont été obligés de trouver rapidement des solutions en distanciel pour maintenir leurs formations. Ainsi, l’utilisation des plateformes de cours en ligne a bondi de 190% par rapport à 2019.
L’émergence de nouvelles technologies innovantes accompagne le développement du e-learning
L’offre de formation en ligne s’enrichit à travers le développement de nouvelles technologies. Outre les plateformes d’e-learning, le secteur a vu apparaitre différents procédés innovants :
- Social learning
Échanges via un réseau social d’entreprise pour regrouper, diffuser les savoirs informels contenus dans l’entreprise, complétant les formations présentielles et e-learning
Exemple : forums de discussion
- Serious game
Application informatique permettant d’associer un objectif avec un moyen ludique (jeux vidéo, gamification…)
Exemple : jeu vidéo à destination des futurs infirmiers qui reproduit les conditions d’une salle d’urgence à l’hôpital
- Adaptive learning
Méthode permettant de personnaliser une formation à chaque apprenant
Exemple : test d’entrée permettant de diriger l’apprenant vers le niveau de formation lui correspondant
- Augmented learning
Modalité utilisant la technologie de réalité augmentée qui exploite une interface virtuelle venant enrichir la réalité en y intégrant des objets et informations complémentaires
Exemple : les médecins peuvent faire des chirurgies virtuelles et observer l’interaction entre les muscles et les organes
Le e-learning multimédia et le blended learning ont davantage la cote
Les techniques de digital learning les plus employées par les entreprises et organisations en France sont le e-learning multimédia à 23% suivi par le blended learning à 19%. Les classes virtuelles et SPOC et MOOC arrivent en quatrième position à 17% et enfin le mobile learning à 10%.
Le blended learning devient de plus en plus répandu. Il est encouragé par l’Etat français qui, par exemple, a publié l’arrêté du 10 juin 2021 offrant la possibilité aux organismes de formation pour les aides-soignants et auxiliaires de puériculture de digitaliser à hauteur de 30% la partie théorique. Le digital learning s’ouvre donc à de nouveaux marchés.
Le e-learning : une solution attractive pour les entreprises et les organismes ou centres de formation
Le premier atout de la formation en e-learning est qu’elle représente un coût d’environ 35 à 60% inférieur par rapport à une formation en présentiel. Même si cette modalité nécessite des investissements plus importants en outils que la formation en présentiel, elle permet d’économiser les frais de déplacement des personnes formées, la location de locaux, ainsi que les coûts récurrents de formateurs.
Le e-learning offre aussi plus de flexibilité en termes d’horaires, de localisation et de contenu. La dispense de la formation n’est plus obligatoirement dans un lieu spécifique à un horaire précis, les apprenants de la formation e-learning peuvent choisir quand et où la suivre.
De plus, les formations en e-learning ont la capacité de s’adapter à chaque individu. Dans certains cas, notamment pour les formations diplômantes, un premier test est effectué par le formateur pour déterminer les besoins de chaque apprenant et adapter en fonction le contenu de leur formation.
L’étude « Les managers et les formations diplômantes en e-learning » menée par OpinionWay en 2019 montre que 74% des professionnels seraient prêts à suivre une formation diplômante en e-learning dans les deux prochaines années. Leurs motivations principales reposent sur l’acquisition de nouvelles compétences (70%), l’accélération de leur progression professionnelle (45%), l’obtention d’une meilleure rémunération (37%) et enfin le changement d’orientation professionnelle.
La digitalisation de la formation implique un investissement dans les outils, les contenus, et l’accompagnement au changement
La dispense de formations en ligne requiert avant tout un équipement de l’apprenant. Or, en 2019, 14% des foyers français n’avaient pas accès à internet, et 17% n’étaient pas équipés d’un ordinateur. Les entreprises ou organismes de formation doivent donc proposer des solutions d’équipement pour ces populations, afin de leur permettre d’accéder aux outils en ligne.
Le déploiement de la formation en ligne nécessite également de former et d’accompagner les apprenants, les formateurs et les ingénieurs pédagogiques aux outils et modalités de formation en ligne. La conduite du changement et les formations à la prise en main des outils sont donc centrales afin de lever les freins au changement. Les modalités de suivi des apprenants évoluent également avec la digitalisation des formations. En effet, le formateur historiquement en présentiel alloue désormais plus de temps au coaching et à l’accompagnement personnalisé de l’apprenant.
Pour offrir de la formation en ligne, les organismes de formation ou entreprises doivent concevoir un parcours de formation avec des formats adaptés selon les compétences à enseigner. La production de contenus digitalisés requiert des compétences spécifiques d’ingénierie pédagogique. C’est ainsi que les organisations recrutent des chefs de projet digital learning et autres concepteurs e-learning, ou ont recourt à des entreprises prestataires pour appuyer la digitalisation de leur formation.
La digitalisation de la formation requiert également de s’appuyer sur des outils numériques robustes, qui seront le canal de dispense des formations en ligne. Pour ce faire, les organisations ont souvent recours à un fournisseur de solution LMS (learning management system), ou développent parfois leur propre plateforme en ligne. Les LMS sont des logiciels permettant de gérer une plateforme d’apprentissage en ligne. Le choix de l’entreprise partenaire s’avère donc important pour déployer des formations en ligne de qualité à moindre coût.
Le marché du digital learning est aujourd’hui très éclaté et voit émerger ses premiers leaders
Sur le marché du digital learning, nous pouvons identifier trois segments principaux :
- Les acteurs développant et commercialisant les plateformes LMS : ils vendent leurs solutions aux organismes de formation et aux entreprises souhaitant mettre à disposition des formations en ligne à leurs employés. De nombreuses entreprises sont présentes en France comme 360Learning qui a levé 36 millions d’euros en 2019, ou Dokeos.
- Les producteurs de contenus de formation digitalisés: acteurs prestant auprès des organismes de formation et des entreprises qui souhaitent externaliser la production de contenu pédagogique en ligne. Contrairement aux développeurs de plateformes LMS qui sont des acteurs de taille importante, les entreprises digitalisant les contenus de formation sont de taille petite et moyenne.
- Les organismes de formation 100% en ligne : ils développent et commercialisent leur propre plateforme et leurs contenus pédagogiques. Parmi eux se trouvent OpenClassrooms, qui a levé environ 150 millions d’euros entre 2018 et 2021, et Studi, filiale de Galileo Global Education.
Une tendance de croissance se prolonge sur les prochaines années
L’observatoire de l’EdTech (entreprises des technologies de l’éducation) recense plus de 500 acteurs au sein des segments scolaire, enseignement supérieur et formation en France. En 2020, la valeur du marché de l’EdTech en France représente 650 millions d’euros et ce dernier compte 7 000 emplois. Après le boom associé à la crise sanitaire de 2020, la croissance du secteur devrait se confirmer dans la durée : les dernières levées de fonds, 100 millions de dollars pour Ornikar en 2021, et encore 20 millions de dollars pour Holberton en 2021, témoignent de la confiance des investisseurs dans le développement du marché.
L’Etat ambitionne également d’accélérer la transformation digitale du secteur de la formation. Le Haut-commissariat aux Compétences a lancé l’appel à projets Deffinum (Dispositifs France Formation Innovante Numérique) en mai 2021 dans le cadre du PIC (Plan d’Investissement dans les Compétences). Son budget global de 300 millions d’euros a pour but d’accélérer l’hybridation de leurs formations et déployer des pédagogies innovantes.
Le marché du digital learning en France est promis à de belles perspectives de développement, avec une croissance supérieure à 10% les prochaines années. La volonté de l’Etat français d’accélérer les projets digitaux, le développement important des technologies de l’éducation et les avantages concurrentiels vis-à-vis de la formation traditionnelle en termes de flexibilité et de coûts, catalysent la digitalisation du secteur de la formation. Où en êtes-vous dans votre transformation digitale ? Détenez-vous toutes les clés pour prendre le tournant et engager toutes les parties prenantes autour de cette transformation pour en faire un succès ?
Sources : FFFOD ; INSEE ; MCI ; Right liens ; Business Scoot ; Opinion Way ; C2RP ; Digiforma ; Futura ; Cairn ; Dynamique Mag